Jetons un coup d’œil sur les chronos réalisés par l’élite de la distance olympique également appelée « Distance M» en France (1500m nat – 40 km vélo avec drafting – 10 km càp) lors de la Série de la Coupe du Monde à Sydney le 10 avril 2011.
« Javiez Gomez débute la saison comme il l’a terminée. Le champion du Monde 2010 réalise une superbe course. Tout en maitrise, il a réussi à dompter le jeune Jonathan Brownlee et l’expérimenté Riederer. Côté français, excellente prestation de David Hauss, 5ème à 27’’ du vainqueur. » (GH)
Voici le tableau des temps réalisés par le Top 5 hommes dans chacune des disciplines y compris les transitions.
En analysant les temps de transitions, on remarque évidemment qu’ils sont très courts et pratiquement identiques. La Transition 1 (T1), c'est-à-dire la transition entre la natation et le vélo, est bien plus longue que la transition 2 (T2 : vélo - course à pied) et cela pour tous les triathlètes. En y regardant de plus près, le n°3 Sen Riederer rate la seconde marche du podium pour 5 secondes. Or, le n°2 Brownlee, au total des 3 disciplines, a été 1 seconde plus lent que notre n°3… Les places sur un podium mondial se sont donc jouées uniquement dans les transitions. T1+T2 = 58 secondes pour Brownlee, contre 64 secondes pour Riederer. 6 secondes qui valent de « l’argent » au lieu du bronze. Cela fait tout de même une différence de 10%...
Il s’agit d’une épreuve courte distance "Olympique" mais je peux également témoigner que sur distance Ironman, toutes les secondes passées en transition peuvent également peser lourd au final … En septembre 2010 sur l’Elbaman (Ile d’Elbe - Italie- Distance Ironman), j'ai manqué la 12° place au général mais surtout la seconde marche du podium en catégorie V1 (40-44 ans) pour… 4 secondes ! Après analyse, j'ai constaté que j'avais mis 30 secondes de plus en transition que l’athlète qui m'a finalement précèdé au classement de ma catégorie.
Donc, pour répondre à la question : OUI, pour moi les transitions sont importantes à soigner et ce quel que soit le format de la compétition. C'est une discipline à part entière de notre sport. Faire de bonnes transitions permet :
- de gagner sans trop d’effort des secondes, voire des minutes (ou de ne pas en perdre stupidement)
- de rester, dans le rythme de la course, concentré et motivé pour l'épreuve sportive qui suit… et oui, une étape se termine, bravo…, mais la course n’est pas encore finie !
OK, maintenant que vous êtes convaincu de l’importance de tes transitions, vous voulez évidemment connaître quelques les clefs pour bien les réussir... Encore un peu de patience !
La transition la plus rapide que j’ai jamais vue, c’est lors d’un Aquathlon (Natation + Course), chez des enfants. Un garçon est sorti de l’eau, est passé dans la zone de transition sans s’arrêter et a couru pied nu sans retirer ni bonnet ni lunettes, dossard épinglé sur sa trifonction. Transition « éclair », on ne peut pas faire beaucoup mieux. Conclusion: pour réaliser un enchainement rapide, il faut réduire le nombre d’action à réaliser en zone de transition. Voyons, lors d’un triathlon "Olympique", quelles sont les actions nécessaires, optionnelles et chronophages (pour info, surfer sur internet est une activité chronophage !)
Transition 1 (T1 : natation – vélo)
Nécessaires : Enlever sa combinaison de natation (si port autorisé ou obligatoire ) – Enlever son bonnet et ses lunettes – Enfiler ses chaussures (vélo, si pédales automatiques / running, si pédales classiques) - Mettre son casque – Pousser son vélo jusqu’à la sortie.
Optionnelles : Mettre des chaussettes – Mettre des lunettes – Mettre un maillot cycliste (selon météo) – Boucler sa ceinture porte-dossard (si l’organisation interdit de nager avec le dossard) – Mettre de la crème solaire,...
Chronophages : Prendre un bain de pied dans un bassin d’eau – Se sécher de la tête au pied avec une serviette - Changer de tenue et enfiler une nouvelle spécialement conçue pour le cyclisme – Regonfler ses pneus – Se ravitailler - Faire un passage par les WC - Faire un brin de causette avec les spectateurs/trices - Poser pour les photos – Faire un barbecue…
Transition 2 (T2 : vélo – course à pied)
Nécessaires : Descendre de vélo sur la ligne d’entrée du parc – Déposer son vélo à l’emplacement prévu (souvent le même qu’en T1) - Changer de chaussures pour des chaussures adaptées à la course à pied (si on a des pédales automatiques) - Tourner sa ceinture porte dossard (si dossards pas épinglés sur la trifonction).
Optionnelles : Enlever son casque une fois le vélo déposé (il n'est pas interdit de courir avec le casque ! Ce que font souvent les enfants sur courtes distances. Mais bon...) – Mettre une casquette ou une visière – Remettre de la crème solaire,...
Chronophages : Mettre sa ceinture porte-gourdes – Se changer en tenue complète de running – Enfiler des bas de compression – Changer de chaussettes - Abandonner et aller boire une verre avant tout le monde, ...
Pour finir, voici la procédure que j’essaie d’appliquer afin d'améliorer mes transitions (je m’autorise une petite marge d’erreur… car je me laisse vite distraire et il y tant de choses auxquelles il faut penser…) :
- Faire toute la course avec la même tenue (trifonction ou short+singlet). J’enfilerai la combinaison de natation par-dessus si elle est autorisée. Au-delà de 500 mètres de natation, je suis sûr d’être plus rapide avec la combinaison que sans y compris le temps de son « désenfilage » (que je maitrise avec l'habitude). Le gain de temps, même s’il est faible sur très courte distance, n’est pas négligeable.
- Mémoriser mon emplacement en prenant des repères visuels extérieurs fixes (tentes, panneaux, arbres). Sauf pour le premier la vision du parc sera différente de celle de l’avant course : des vélos seront manquants/partis.
- Retenir mon numéro de dossard (ce n° est indiqué sur les supports-vélo, ça aide).
- Bien situer les entrées et sorties du parc.
- Faire une ou deux simulations avant l’épreuve en courant vers mon emplacement (c’est complètement différent que de le faire en marchant !). Faire cette simulation pour T1 et pour T2. C’est un trajet différent selon la transition et cela va changer inévitablement les repères.
- Bien positionner mon matériel : vélo (bien stable), chaussures (déjà lanières ouvertes ou fixées sur les pédales), casque (ouverture vers le haut et jugulaires pendantes), lunettes (« plantées » dans les aérations du casque), chaussures course à pied déjà lacées pour être enfilées sans perde de temps (il existe des lacets élastiques bien pratiques). Le tout dans une logique habituelle, celle que j’ai répétée à l’entrainement. Vérifier que tout est bien visible. Si l’organisation m’oblige à tout mettre dans un sac, je viderai le contenu à mes pieds. Je n’y mettrai que le matériel strictement nécessaire. Eviter les plans B, genre un KW au cas où, une seconde paire de lunettes pour changer de look et pourquoi pas un petit déjeuner si j’ai encore faim, du papier toilettes, des pansements, le journal,…
- A la fin d'une épreuve, préparer la transition physiquement. A la fin de la natation battre des jambes les 100 derniers mètres. A la fin de la partie vélo (2 derniers km), mouliner, penser cadence plutôt que force et en ce qui concerne la respiration se mettre en danseuse et simuler une ventilation de course à pied.
- Mais aussi, préparer la transition mentalement, faire la « check-list » et visualiser les actions à faire et, leur ordre.
- Toujours courir vers et dans la zone en faisant attention à la collision avec les autres... il y a un chassé-croisé permanent dans cette petite fourmilière.
- Se remémorer son emplacement grâce aux repères pris préalablement pour éviter de foncer dans tous les coins comme une poule à qui on vient de couper le tête.
- Respecter ma procédure établie et répétée à l’entrainement (ex : ne pas déchausser sur le vélo avant la transition si je ne l’ai pas prévu… ne pas singer les autres concurrents le jour J !)
- Faire un maximum d’action en mouvement (en minimisant les temps d’arrêts dans les aires de transition). Dès la sortie de l’eau, retirer en partie sa combinaison (les bras et le torse), son bonnet et ses lunettes. Finir de retirer sa combinaison (les jambes) une fois à l’arrêt pour ne pas chuter. Attention : mettre et enlever son casque doit se faire qu’une fois arrivé à son emplacement (sous peine d’être sanctionné par un arbitre). Enfiler mes chaussures vélos sans fermer les lanières (ajuster en pédalant après la sortie du parc), mettre mes lunettes une fois sur le vélo, boire une fois sur le vélo (sauter le ravitaillement).
- Au retour de la partie cycliste, (200 derniers mètres avant T2) desserrer les lanières des chaussures cyclistes et les laisser fixées sur les pédales au moment de descendre du vélo. Courir en chaussettes ou pied nus (selon le sol) en poussant le vélo jusqu’à mon emplacement. NB: Si la partie vélo se fait en VTT, je "déclipse" et cours avec mes chaussures vélo car leur conception spéciale le permet.
- Déposer le vélo et le positionner de façon stable (parfois les porte vélos sont tellement inadaptés que le mieux c’est de le déposer directement par terre… au moins il ne tombera pas plus bas et ne s’abimera pas). Enlever mon casque, le déposer à la place des chaussures de course à pied, déjà enfilées.
- Tout en quittant le parc en courant: tourner ma ceinture porte-dossard (numéro sur devant), mettre la visière (utile pour la transpiration, le soleil ou la pluie) et les lunettes (si il y a beaucoup de soleil).
- Prendre une bouteille d’eau à la sortie du parc pour avaler avec un gel énergétique (placer dans la poche de ma trifonction)
La course finie, c’est T3 qui commence… et là c’est pas la peine que je vous explique comment faire la fête, hein ... et ce sujet risque de ne pas avoir de fin !
Bon Amusement et prudence !